330 hectares, 700 baraquements, 40.000 lits : en 1918, Saint-Parize-le-Châtel a abrité l’un des plus grands hôpitaux américains de la Première Guerre Mondiale. Il n’en reste qu’un château d’eau…
Il y a 100 ans, les troupes américaines débarquaient sur les côtes françaises. Par dizaines puis centaines de milliers, elles vont contribuer, notamment par leur logistique, à la défaite de l’Allemagne dans cette Première Guerre Mondiale.
La solution de Dakin inventée sur le camp
Les Américains parient sur plusieurs années de combat et s’organisent en conséquence. Ils construisent des ports, des gares, des ponts (dont un à Nevers), des camps… Et des hôpitaux de campagne. Le centre de la France est stratégique, proche du front. Un des plus grands “hospital center” est édifié en quelques mois à proximité de Mars-sur-Allier, où il se raccorde au chemin de fer, et dont il portera le nom. Il s’étend en fait principalement sur la commune de Saint-Parize-le-Châtel, et en grande partie sur l’emprise actuelle du circuit de Magny-Cours.
Sur 330 hectares, de janvier à août 1918, c’est une véritable ville éphémère qui va voir le jour : 700 baraquements, des dortoirs et salles d’opération calibrés pour 40.000 blessés, des camps de convalescence mais aussi des laboratoires (où deux chirurgiens vont mettre au point la solution de Dakin, célèbre antiseptique), des cuisines, une salle de spectacle… Car le camp fait travailler environ 8.000 personnes, entre personnels de santé et militaires.
Si sa durée de vie sera plus courte que prévu (quelques mois), les Américains ont tout de même le temps d’y monter un orchestre, une équipe de football américain, et même un journal, The Martian. Les premiers blessés seront accueillis en août 1918. Le camp fermera en mai 1919. Il accueillera finalement 12.000 blessés et comptabilisera 438 décès.
Un château d'eau demeure derrière le circuit de Magny-Cours
De cet épisode méconnu, à l’image d’un débarquement effacé des mémoires par celui de 1944, il ne reste pas grand-chose. Matériellement, un château d’eau, construit par les Américains et qui n’a jamais eu le temps de servir, mais qui se dresse encore à l’entrée du village, derrière le circuit de Magny-Cours.
Quelques morceaux de vestiges des installations américaines ont été retrouvés récemment par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), dont les archéologues spécialistes de la Grande Guerre ont découvert par hasard l’existence de l’hôpital américain en 2014. « Le plus grand en France, à ma connaissance » témoigne Alexandre Coulaud, spécialiste en archéologie contemporaine, qui participe à une équipe de recherche sur les Américains dans la Grande Guerre.
En juin prochain, il viendra présenter une partie des objets trouvés, à Saint-Parize. « Nous n’en sommes qu’au début de la recherche » assure d’ailleurs Alexandre Coulaud.
En juin aussi, un parcours de mémoire, de 6 à 12 km, reconstitué par ceux qui entretiennent le souvenir, dont Gianni Belli et le Cercle d’Entraide Généalogique Heredit, permettra de mieux visualiser l’ampleur du camp.
Enfin, ce qui reste aussi de cet épisode américain, ce sont des familles de descendants, en particulier celle de Rébécca Goethe, fille de Moiry (alors hameau de Saint-Parize) et de Charles De Vries, aide-infirmier dans les American Expeditionary Forces. Leur fille Lucy, aujourd’hui âgée de 84 ans, reviendra aussi pour les commémorations prévues du 23 au 25 juin.
Alain Gavriloff/ lejdc.fr